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Avignon 2017…on y danse, en IN, en OFF. ‘Nativos’ (Ayelen Parolin) et ‘Fiesta'(Israel Galvan). Raffinement et ouverture au monde.

Le meilleur spectacle de danse d’Avignon a lieu dans le off. Il a pour nom ‘Nativos’, de l’Argentine de Belgique, Ayelen Parolin, programmé par le Théâtre des Doms dans le studio des Hivernales. En Cour d’Honneur Israel Galvan déconstruit une ‘fiesta’ flamenca triste, un peu écrasée dans un espace immense. Le point commun : le goût du mélange des civilisations.

Nativos’ : une géométrie rigoureuse, mêlant humour argentin et perfectionnisme coréen ****

Soit une chorégraphe argentine, Ayelen Parolin, basée à Bruxelles, réputée pour sa fantaisie et son humour. Mais dans une de ses  dernières œuvres majeures, ‘Hérétiques’, elle jouait sur la répétition obsessionnelle,  mathématique, par deux danseurs synchrones, d’un même mouvement des mains, en forme de triangle. Le tout soutenu par la rythmique de Léa Pétra utilisant son piano comme un clavier non relié à ses marteaux amplificateurs,  martelant donc des percussions ‘sourdes’. Etonnant. A l’initiative de Serge Rangoni, directeur du Théâtre de Liège, la voilà confrontée à 4 danseurs du Ballet National coréen et à un percussionniste et chanteur chamanique Yeo Seong Ryong pour une nouvelle œuvre intitulée ‘Nativos ‘. ‘Beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie ‘selon la fameuse formule de Lautréamont dans les Chants de Maldoror’? Bien mieux !  Les contradictions entre une tradition religieuse visant à un état de transe parfaite et une chorégraphe iconoclaste aimant jouer à la fois l’ordre et le désordre auraient pu produire un échec sanglant. C’est tout le contraire qui se produit : Ayelen profite de la qualité technique exceptionnelle des danseurs coréens pour produire une de ses œuvres les plus rigoureuses. Et les Coréens introduisant dans leur monde un grain d’humour et de fantaisie qui les transforme en personnages intéressants, des individus en recherche plus que des mécaniques parfaites dans l’espace. Avec un bel accord des 2 percussionnistes, le piano de Léa Pétra et le tambour shamanique de Yeo Seong Ryong. A Avignon, le bel espace comble des Hivernales, 120 places, est à la mesure de cette danse de chambre où l’expérience peut se partager avec un public curieux.

‘Fiesta’ Israel Galvan***

– © Christophe Raynaud De Lage

Je crois, dit Israel Galvan que la fête est l’expression et la nécessité de ma culture’. Mais cet héritier du flamenco paternel propose au grand public de la Cour d’Honneur une ‘fin de fête’ intimiste, occupant à peine une moitié de la Cour. Et il casse les codes du flamenco ‘touristique’ au point d’énerver une partie du public venu en formation  » club Med  » plus qu’en ouverture vers la nouveauté. Dommage mais on a admiré la vaillance d’Israel Galvan lancé dans un solo étourdissant dans sa la dernière demi-heure d’un spectacle court (1H30) et qui a résisté à ce flot de vulgarité agressive d’une partie du public narguant son art. Avec , heureusementune grande majorité du public enthousiaste.

Il avait pourtant bien commencé,Israel Galvan laissant son équipe de musiciens et chanteurs occuper le plateau de la Cour avant de dévaler seul, sur les fesses, dans des positions acrobatiques, la vertigineuse série des escaliers. Ce début humoristique était une manière de jouer la performance physique et  d’amadouer le chaland. Mais dans le ‘flamenco’ classique on est habitué à voir des musiciens se mettre au service de danseurs et danseuses virtuoses…debout, dont ils accompagnent les évolutions érotiques rituelles de chants déchirants. Ici les chants sont bien là mais un peu forcés, poussés presque à la caricature par son complice le chanteur Nino del Eche ? Il y a là une délicieuse petite vieille gitane Uchi, qui rappelle brièvement  les fondamentaux mais aussi un chœur byzantin ou Alia Sellami, aussi forte dans le chant arabe que dans la musique classique . Galvan veut ‘donner’ son flamenco familial au monde entier :’une voix, dit Galvan, devient  flamenca dès qu’elle se pose entre flamencos’. Une belle générosité battue en brèche par un excès de gags, une profusion de styles mal enfilés, souvent décousus, jusqu’au solo final sans doute trop long et agressif, mêlant allégrement masculin et féminin devant un public peu acquis au mélange des genres. Au total une œuvre qui aurait sans doute mieux fonctionné dans un lieu plus intime où les ‘codes brisés’ et les expériences sont non seulement admises mais recherchées.

Nativos, d’Ayelen Parolin, (programmée par les Doms au studio des Hivernales d’Avignon) jusqu’au 19 juillet

Fiesta, d’Israel Galvan, en Cour d’Honneur, jusqu’au 23 juillet.

Christian Jade (RTBF.be)

 

 

Cet article est également disponible sur www.rtbf.be

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