• Théâtre  • « Dimanche ». Un quotidien paisible guetté par les menaces climatiques. Un théâtre visuel, virtuose et poétique ****

« Dimanche ». Un quotidien paisible guetté par les menaces climatiques. Un théâtre visuel, virtuose et poétique ****

Imaginez un dimanche relax dans une famille petite bourgeoise dégustant son café-croissants. Un couple et une grand-mère attendrissante, sous la forme d’une délicieuse marionnette. Autour d’eux, le monde court à la catastrophe. Les trois mêmes acteurs/trices se muent en un trio de reporters parcourant un univers guetté par la fonte des pôles, les inondations angoissantes et les tempêtes catastrophiques.

L’art des compagnies Chaliwaté et Focus est de rendre sensibles ces réalités sans tomber dans le prêchi-prêcha. Un génial bricolage (apparent) qui tient du conte de fées et du rêve éveillé, hanté par des trouilles magistrales.

La compagnie Chaliwaté (Sandrine Heyraud et Sicaire Durieux) nous avait déjà charmés avec Josephina et Jetlag mais son talent est sorti renforcé par son union avec la compagnie Focus de Julie Tenret. Les trois ami(e)s conçoivent et jouent leurs spectacles, passant parfois le relais à d’autres, triés sur le volet.

Leur première collaboration, le délicieux Backup, programmé au Festival XS, alors dirigé par Alexandre Caputo au National, a parcouru le monde. La célébrité vint du Festival d’Edimbourg et de son célèbre « Fringe », le grand marché mondial des nouveautés scéniques, plus mondialisé qu’Avignon. Ils reviennent donc tout naturellement aux Tanneurs dirigés désormais par Alexandre Caputo avant de poursuivre en Belgique et dans le monde.

Dimanche, la suite de Backup fait plus que tenir ses promesses. La forme courte initiale qui donnait à voir la fonte des glaces et la naissance attendrissante d’un ourson sur la banquise menacée introduit le nouveau spectacle. Ciel, une répétition ? Non, une accroche qui ne se dilue pas dans une suite molle mais porte le drame climatique chez nous, dans une famille paisible surprise dans ses habitudes. Les trois reporters initiaux parcourent le monde, scrutent les périls à venir, délivrent leur message via une caméra explorant le temps et l’espace, le ciel et les océans.  Leurs aventures rebondissent sur l’écran TV du vieux couple et leur Mémé. Cet écran devient le nôtre mais surtout la menace annoncée par la vidéo assaille la maison par des tempêtes décoiffantes et des inondations catastrophiques vécues « live » mais avec un humour qui les met à distance.

Ce qui nous épate et nous bluffe, prêtant à frémir et sourire, c’est l’incroyable bricolage qui fait la force du récit avec ses « coups de théâtre » marrants et/ou inquiétants. L’équipe mêle tous les arts archaïques, marionnette, masque, théâtre d’objets (comme cette table qui fond à vue d’œil et menace ce couple paisible).Mais la  mise en scène en scène est de type cinéma muet, faussement archaïque, très moderne, hyper séduisante.

Le message est donc « écolo », d’actualité, mais dans une forme légère qui séduit tous les publics : les  « vieux » y trouveront des tas de références et de « seconds degrés », les jeunes un rythme, un comique de situation, une dynamique de l’image qui emportent la salle dans une sorte de bonheur collectif, le but ultime de tout bon spectacle vivant.

Dimanche des compagnies Chaliwaté et Focus – Aux Tanneurs (Bruxelles) jusqu’au 30 novembre.

 A Tournai (Maison de la Culture), 3-4 décembre.

A Luxembourg (Rotonde), 24- 25 janvier. Avant quelques festivals de par le monde.

Cet article est également disponible sur www.rtbf.be

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