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La Balsa, une quadra en pleine forme

Quarante ans de Balsamine ! Ça correspond à peu près à ma carrière de journaliste politique et de critique culturel à la RTBF.

D’où mon plaisir à faire l’éloge de cette incroyable « personnage », Martine Wyckaert directrice de théâtre, metteuse en scène et écrivaine (dont le portrait d’ouverture a été « tiré » par Hichem Dahes).

Un éloge parmi des dizaines d’autres dans une forme concoctée par Fabien Dehasseler selon un schéma amusant : 4 lieux dans la Balsamine, une lecture au choix d’un extrait d’une œuvre de Martine et un portrait souvenir de la Dame en son Lieu. Vous le trouverez ci-dessous.

Un petit ajout plus historique, didactique. Le lieu, la Balsa. Le personnage, Martine. Oui mais :

Un personnage dans un lieu pour quoi faire ? 

Fin septante, début 80 quand elle squatte la caserne Dailly Martine est la seule femme d’envergure, avec Isabelle Pousseur, dans cette magnifique génération très masculine, de Liebens à Van Kessel, de Sireuil à Dezoteux ou Delcuvellerie. Féministe de fait dans une décennie qui commence à libérer les femmes, elle construit petit à petit un monde à elle. En partant de grands textes mais qu’elle construit /déconstruit. Witkiewicz (La Pilule Verte), Shakespeare (pas moins de 4 tragédies historiques compactées pour s’interroger sur la paternité et la filiation). Et aussi cet étonnant « Léopold II » d’Hugo Claus , dans une autre caserne au Sablon : il y a 40 ans on savait déjà que Léopold II n’était pas le « civilisateur » de nos manuels scolaires. 

S’agissant de politique j’ai un souvenir fulgurant de Martine, récompensée aux Prix de la Critique (Prix Abraté 2014  pour l’ensemble de son œuvre) faisant la leçon à la Ministre  Joelle Milquet, très fair play, admirative d’un tel talent oratoire.

Vint un moment où Martine se détache de l’intendance (la « direction ») qu’elle confie à Christian Machiels pour construire son œuvre personnelle de briques et de mots, de trilogie en trilogie, aidée par Valérie Jung sa complice et son double visuel :images, espaces, couleurs, logorrhées de mots et silence. 

Pour moi une de ses plus belles œuvres est cette « Nature morte » où la parole devient un paysage orchestré par Valérie Jung.  Le lieu, la Balsa c’est un peu la source de son écriture autant que son histoire familiale qui irrigue ses trilogies de l’intérieur. « Détruire dit-elle » disait Marguerite Duras. Construire/démolir/reconstruire sans fin semble la devise de Martine.

Sa dernière œuvre « Forêts paisibles » vous en trouverez le résumé ci-dessous. Un vaudeville sur une descendance dégénérée. 

Puis une brève évocation des nouveaux directeurs de la Balsa, Isabelle Bats et Mathias Varenne, continuateurs d’une tradition performative solidement implantée dans le paysage balsamique.

© Hichem Dahes 

« Forêts paisibles » de Martine Wyckaert

Citation de la présentation

« Dans une construction précaire en bois brut, se joue un vaudeville mythologique : voici qu’un couple de satyres s’est vu affligé de la naissance d’une enfant anormale, les velus ongulés ont engendré du glabre en baskets … Forêts paisibles porte à la scène un trio familial, affligeant de médiocrité, télescopé par le jeu du fantasme, dans un monde archaïque où les interdits du meurtre et de l’inceste ne sont pas encore tout à fait clairement démêlés. Le spectacle est une pantalonnade traitant de la dégénérescence et s’emparant pour la raconter des mécanismes du vaudeville où l’absurde le dispute avec la trivialité la plus plate. Ira-t-on jusqu’à la transgression absolue : l’assassinat perpétré par les géniteurs sur leur progéniture ?

Écrit pour Alexandre Trocki, Véronique Dumont et Héloïse Jadoul »

« Forêts paisibles » de Martine Wyckaert du 15 au 25 juin 

© Hichem Dahes 

Isabelle Bats et Mathias Varenne directeurs. Cap Performance

Le duo, qui succède à Monica Gomes (pour  un mandat de 5 ans)  a été choisi pour « investir la Balsamine comme on investit un jardin… d’artistes ». Leur projet s’appuie sur des pratiques émergentes et  transdisciplinaires ,avec 2 mots clé, décloisonnement et ouverture. Avec un œil sur les cultures urbaines et le réseau francophone international et un clin d’œil aux institutions néerlandophones. Déjà des noms : Ahilan Ratnamohan et son projet ‘The perfect migrant ». Gaétan Rusqiuet et son « Edge » , Joëlle Sambi 

Neza et ses « Angles morts », Lorette Moreau et sa « Solastalgia ». Et un projet récurrent un cycle de rencontres sur le Matrimoine.

Mathias Varenne

Un Français débarqué en Belgique il y a 15 ans à l’ESACT où il se passionne pour la création collective, le lien intime/politique et l’interdisciplinarité. Il découvre la scène performative bruxelloise à la Bellone dirigée par Antoine Pickels. Son projet La Preuve a été doublement récompensé au festival liégeois Emulation en 2014. « Hurler sous la lune »a été accueilli par le KFDA en 2019.

Isabelle Bats

Formée à la mise en scène à l’Insas elle s’implique dans l’écriture avec «  La Méduse » puis dans des projets hybrides mêlant théâtre et performance .La performance prend petit à petit le pas sur le théâtre mais elle aime « mettre en friction » parole, corps et installation. « Actante » dans le projet « Belles d’hier » de Phia Ménard elle prend part au combats féministes actuels. Elle est une des 4 créatrices du collectif féministe F(s)et crée « girl/fille »en 2019.

© Fabien Dehasseler

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