• Théâtre  • Le Rideau au cœur d’Ixelles. Les nomades atterrissent dans l’euphorie.

Le Rideau au cœur d’Ixelles. Les nomades atterrissent dans l’euphorie.

Hier matin, Michael Delaunoy, le Directeur du Rideau et sa Secrétaire Générale, Catherine Briard orchestraient avec Olivier Bastin, le Président du CA une joyeuse entrée dans un lieu improbable, intelligemment rénové au cœur d’Ixelles, par deux jeunes architectes Stéphane Damsin et Jan Haerens.

En présence d’Alda Gréoli, Ministre de la Culture (en affaires courantes) et du Bourgmestre d’Ixelles Christos Doulkeridis, gagnés par la bonne humeur ambiante. Le lieu est à la fois séduisant et rationnel, jouant sur l’archaïsme mais unifiant intelligemment tous les métiers du théâtre, artistique, administratif et festif, transformant la salle archaïque en un bel espace de jeu.

 Vous pouvez découvrir le nouveau lieu lors d’une fête conviviale et gratuite à spectacles multiples ce week end (7 et 8 septembre) dans cette « maison du théâtre » au 7A rue Goffart. Renseignements au www.rideaudebruxelles.be

Du nomadisme au « Comme chez soi ». L’interview de Michael Delaunoy et Catherine Briard

Le Rideau de Bruxelles rénové

Le Rideau de Bruxelles rénové – © Alice Piemme

Du Palais des Beaux-Arts au cœur d’Ixelles, quel marathon !

Catherine Briard : Quand on a quitté les Beaux-Arts, on a décidé avec Michael de partir en nomadisme, ce qui était un énorme risque, où certains ont dû voir la mort du Rideau approcher. Mais ces années ont permis des rencontres chaleureuses. Le réseau théâtral bruxellois a été d’une extraordinaire solidarité avec nous.

Mais il fallait bien se poser quelque part ? La Commune d’Ixelles vous a proposé un bâtiment occupé par l’XL Théâtre de Bernard Damien.

Michael Delaunoy : Il fallait rafraîchir ce lieu et résoudre le problème d’isolation acoustique, remettre aux normes, rétablir la circulation des artistes et du public. Car les espaces publics étaient sur différents niveaux, et pour les personnes à mobilité réduite, ce n’était pas évident de passer de la salle, au bar et à l’extérieur.

 Et là, on retrouve le pragmatisme de Catherine et son sens de la négociation institutionnelle.

Catherine Briard : La commune d’Ixelles a joué un rôle énorme en nous confiant ces bâtiments. Le contrat de base, c’est un loyer très léger avec l’obligation de rénover. C’est tout de même un parcours de 8 années depuis 2011, au cours desquelles on a dû trouver des financements. Triodos et le Crédal, se sont mis ensemble pour nous accorder un emprunt de 500 000 euros. On a aussi reçu une aide de la Fédération Wallonie-Bruxelles en infrastructure de 475 000 euros. Nous avions un fonds propre accordé par Fadila Laanan de 200 000 euros via la Loterie Nationale. Au moment de notre déménagement nous avons reçu des enveloppes de frais de relocalisation mis de côté pour ce budget de rénovation.

Il fallait aussi trouver des architectes en harmonie avec le lieu et …vous.

Michael Delaunoy : On a organisé un concours, avec l’aide de la Fédération Wallonie-Bruxelles, en particulier Chantal Dassonville. Le projet de deux jeunes architectes, Jan Haerens et Stephane Damsi (qui ont depuis décroché le nouveau Jean Vilar à LLN), nous a immédiatement séduits car il organisait toutes les fonctions du théâtre, salle, bar, administration autour d’un vide, la cour, en en faisant un patio et un puits de lumière. On pourrait se dire qu’on perd de l’espace avec ce vide mais au contraire, tout devient beaucoup plus fluide. En outre ils n’effacent pas les racines, ils gardent partout l’âme du lieu, des signes de son histoire et organisent une convivialité des équipes et des voisins. C’est un notre  » Maison de Théâtre « , un lieu à échelle humaine où on peut pousser la porte et venir nous parler.

Vous adorez le quartier qui vous change de Bozar.

Michael Delaunoy : C’est un quartier formidable à Ixelles, entre Matonge, le quartier européen, la place Flagey, la place Fernand Coq, un carrefour de différents Bruxelles, de différentes populations qui se côtoient. Un quartier très vivant avec des cafés, des restaurants, des commerces, et avec une population conviviale, pas comme au Mont des Arts !

 

Lumière, harmonie, euphorie.

 Le Rideau de Bruxelles rénové: le

Le Rideau de Bruxelles rénové: le – © Alice Piemme

Pour l’équipe c’est l’euphorie ? ?

Michael Delaunoy : Après toutes ces années de nomadisme où on avait les bureaux d’un côté, les salles de l’autre, et notre équipe technique qui passait plus de temps dans les embouteillages que dans les salles, c’est un énorme soulagement et un vrai plaisir

Catherine Briard et de notre directeur technique Raymond Delepierre étaient toutes les semaines aux réunions de chantier. C’est eux qui étaient aux avant-postes sur la rénovation, ce qui me permettait de rester sur la direction artistique des projets. Mais on n’était pas formés pour ça, on a quasiment appris un nouveau métier.

Reste le plus important la salle. Rehaussée, ré-équipée, plus de sièges, et un côté écolo, le principe de récupération, du recyclage à moindres frais ?

Michael Delaunoy : On a voulu redonner de la hauteur à la salle et de la respiration.  On a donc supprimé l’ancien gradin et le plateau, réhaussé les poutres et gagné 1mètre 50. Ça ne parait pas énorme sur papier, mais ça change tout dans la sensation et pour les scénographes et les éclairagistes, qui ont beaucoup plus de possibilités.

On avait un budget d’1,1 millions pour toute cette rénovation, ce qui à l’échelle d’un théâtre est une petite enveloppe. Il fallait donc ruser avec ça, d’où le travail de récupération. Les sièges viennent du KVS réfugié à Molenbeek pendant de longs travaux. Tout le gril technique, qui nous nous permettra de travailler dans plusieurs configurations date du Palace, à l’époque où le Théâtre National y était. D’autres équipements viennent du théâtre de la Place de Liège,  Ce côté archéologique, c’est bien dans l’esprit du Rideau.

On a augmenté la jauge, passant de 120 à 155 places. Ce n’est pas une très grande jauge, mais ça suffit pour le type de travail qu’on mène sur les écritures.

Un petit coup d’œil à votre saison. 2019/2020 Vous privilégiez auteurs et parole plutôt qu’image ?

Michael Delaunoy :On reste exactement sur les mêmes lignes artistiques, comme le travail sur les nouvelles écritures, ce qui ne veut pas dire un théâtre littéraire. Au Rideau, la question du corps est aussi centrale, le rapport de la parole au corps et du corps de l’acteur au corps du spectateur. On est effectivement plus orienté vers la parole que vers l’image, où la vidéo prendrait tout l’espace. Le théâtre est de toute façon pluriel, il absorbe les autres arts, arts plastiques, danse etc :le théâtre fait feu de tout bois.

Après deux metteurs en scène, vos deux artistes associés sont des écrivains

Michael Delaunoy : Après Frédéric Dussenne et Christophe Sermet, deux metteurs en scène, je souhaitais pour les dernières années de ma direction, permettre à deux artistes de la jeune génération d’avoir accès à cet outil. Mon choix s’est porté sur deux artistes qui à la fois écrivent et mettent en scène leur écriture. Céline Delbecq et Axel Cornil nous accompagnent donc pour les trois dernières saisons que je programme au Rideau de Bruxelles.

A Catherine, le mot de la fin. La Rideau, son bâtiment, ses patrons c’est « pieds sur terre et lumière au ciel » ?

Catherine Briard : La lumière est absolument partout dans le bâtiment, c’est le génie du projet. J’ai les pieds sur terre, mais j’aime avoir la lumière dans la tête également. On peut dire qu’on vient de traverser des bourrasques énormes, et on est ravis que le navire ait enfin son lieu où se poser, à bon port, et maintenant, il va prendre une vitesse de croisière avec le fait que l’on travaille tous ensemble. Pour l’équipe, c’est un vrai soulagement d’arriver ici. Il y a une manifestation de joie à toutes les réunions d’équipe.

Cet article est également disponible sur www.rtbf.be

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