• Théâtre  • Bozar. Festival « Afropolitan », musique, film, stand up. Avec l’humour de Cécile Djunga, en prime.

Bozar. Festival « Afropolitan », musique, film, stand up. Avec l’humour de Cécile Djunga, en prime.

Ce week-end, Bozar vit au rythme africain, centré sur la métropole, « Système Kinshasa ». Concerts, battles hip hop, stand up, films, expo, débats, performances, défilés de mode, marché de créateurs, gastronomie, workshops et programmes pour enfants trois jours intenses de fête mais aussi de réflexion, de rencontres. Dès vendredi soir à partir de de 18h un film de Kalodji, en sa présence, sur toutes les facettes de Kinshasa, suivi du stand up de Cécile Djunga, « Presque célèbre », d’un film « gay friendly » et d’une  after party » avec le DJ ROKIA BAMBA & BAL AFROPEPS.

Le programme complet sur le site de Bozar

Cécile Djunga, « Presque célèbre ». Miss Météo RTBF musclée et humoriste de stand up.  

Cecile Djunga dans

Cecile Djunga dans – © Martin Godfroid

A l’automne 2018, Cécile Djunga faisait le buzz sur Facebook, comme Miss Météo RTBF protestant contre le racisme de certains spectateurs .Mais  sa profession de base c’est le théâtre, le stand up en particulier. Interview 

Christian Jade : Tu as poussé un coup de gueule anti-raciste sur Facebook. Ton combat continue ?  

Cécile Djunga : Depuis septembre je suis devenue comme une porte-parole de la lutte antiracisme. Au début c’était difficile car je ne m’attendais pas à une telle ampleur. Mais j’ai reçu tant de messages de soutien, mais aussi de détresse, notamment de beaucoup de jeunes qui vivent ça au quotidien et qui en souffrent que je veux les aider et ne pas les laisser tomber. Je suis écoutée, j’ai une tribune, notamment grâce à mon spectacle, « Presque célèbre ». Donc j’ai envie de prendre mon rôle à cœur et de ne pas lâcher.

Le stand up féminin est fort à la mode en Afrique francophone. Pourquoi ce succès ?

C’est une façon pour les femmes africaines d’affirmer leurs opinions, de ne pas se laisser faire, de parler du pouvoir en place, des hommes, de la misogynie, d’une certaine dictature. C’est un métier masculin, le stand up. Les hommes ont des a priori :  » tu es une fille donc tu vas nous faire un humour de fille « . Non ! On ne parle pas de maquillage et de garçons pendant 1h30, il y a une vraie revanche à prendre. J’aime bien surprendre les gens, hommes comme femmes et dépasser cette idée qu’une fille doit être jolie, rester très discrète et conventionnelle. Dès qu’on a des propos piquants et engagés ou qu’on parle de choses en- dessous de la ceinture, les gens sont choqués. Ils s’attendent à ce que les femmes ne disent que des choses positives et soient des potiches. Fini, çà !

Tu as présenté « Presque célèbre » récemment à la Maison des cultures de Molenbeek. Quel public ? Quel accueil ?

J’ai été accueillie avec beaucoup de sympathie par un public moitié filles, moitié garçons et j’ai a beaucoup discuté à la fin du spectacle avec des jeunes qui font du théâtre, de la musique, de la danse, qui sont plein de rêves et d’ambitions. J’ai rencontré une commune dynamique, pleine d’envies. Il y avait aussi des seniors, des parents avec de jeunes enfants, des femmes voilées ou non, des blancs, des noirs, des Arabes, des éducateurs avec leurs jeunes, un public divers et varié. Certains venaient même d’Uccle, de Woluwe-Saint-Pierre, Waterloo et ne connaissaient pas la Maison des Cultures, un endroit merveilleux, qui demande à être connu : j’aime ces mélanges. J’ai rencontré des gens fiers de leur commune, qui malheureusement a une image négative via les médias. J’ai rarement joué devant autant de genres et de styles différents et ça c’est formidable. Peut-être que j’y retournerai pour proposer des stages ou des cours de stand-up aux jeunes

Le public de Bozar sera très différent. Tu en attends quoi ?

Je suis fière de jouer à BOZAR, d’être accueillie comme artiste belge d’origine congolaise et de participer à un festival qui met en avant la culture « afropolitaine ». A priori, il y aura des curieux et des amoureux de l’Afrique dans la salle, qu’ils soient noirs ou blancs. Ça va être chaleureux, un peu comme à la maison. J’ai eu la chance de faire la première partie de Youssou N’dour il y a quelques mois : j’adore le public africain. Ils ont une autre manière d’écouter le spectacle, beaucoup plus festive : ils vont rire beaucoup plus, applaudir plus fort, donner un autre rythme à mon solo. Après ça on fait une fête, il y aura un DJ, de la musique africaine. Mais j’espère que le public sera varié avec des amoureux de l’Afrique. Je suis certes noire, d’origine africaine, mais je suis Belge, née et vivant en Belgique et j’espère attirer aussi un public belge blanc Je me pose vraiment la question.

Tu as étudié au Cours Florent avec une formation classique. Entrer dans une troupe et y jouer des rôles, ça te tente ?

C’est 100% mon truc. J’ai fait des études de théâtre classique et contemporain. J’aime beaucoup Tchekhov et Molière, je suis très fan de classique. Ça a toujours été mon rêve de jouer ces pièces, seulement je n’ai pas le « physique pour ». J’ai commencé à être confrontée au racisme quand j’ai voulu avoir des rôles au théâtre. On me reléguait souvent à des seconds rôles très peu intéressants et assez humiliants finalement. Je devais jouer avec des accents « typiques » etc.

On te colle à des rôles « racialisés » ? On n’admet pas qu’une jeune femme noire puisse être une actrice comme les autres ?

C’est exactement ça. Pour moi, je ne me sens pas seulement noire, je me sens belge. J’avais très peu conscience de ça, je ne comprenais pas, ça m’a fort blessée et de cette colère, sont sorties des blagues, parce que je me suis défendue. Le stand-up est venu plus tard quand j’ai eu la chance d’être acceptée par Jamel Debouze.. Quand tu es drôle, on s’en fout de ta couleur de peau, de ton poids ou de ta tête, tant que tu fais rire les gens. L’humour m’a complètement sauvée, car sinon je serais une actrice en dépression aujourd’hui, je n’aurais aucun rôle et je serais très mal. Donc l’humour est venu de façon très surprenante, Mais aujourd’hui je rêve de refaire du théâtre, de jouer en troupe, ça me manque beaucoup d’être sur scène avec d’autres personnes, d’échanger sur des textes, de partir en tournée avec des amis. J’espère que ce sera une prochaine étape, monter sur scène pour faire du classique, sérieux ou comique, ou les deux !

Festival « Afropolitan » à Bozar du 8 au 10 février.

Cet article est également disponible sur www.rtbf.be

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