• Danse  • « Pays de Danse » 2020 : des parfums forts, portugais, africains, urbains et belges ***

« Pays de Danse » 2020 : des parfums forts, portugais, africains, urbains et belges ***

Ce festival bisannuel de danse du Théâtre de Liège est une des bonnes occasions (avec la Biennale de Charleroi Danse et les deux festivals annuels aux Brigittines/Bruxelles) de rassembler des créations internationales de haut niveau et le meilleur de la production belge francophone. Curieux, à vos marques.

« Pays de danse » rassemble tous les deux ans autour d’un axe international des productions qu’elle diffuse à la fois au Théâtre de Liège, dans divers centres culturels de la région et dans l’Euregio, de Hasselt à Maastricht. Tour à tour la Corée du Sud, l’Argentine et l’Afrique du Sud ont fait résonner les accents de la danse mondiale. Cette année on reste en Europe avec le Portugal et ses nuances.  Capable de produire de la danse néo-classique, de la street danse et des chorégraphies liées à l’Afrique, avec le lien ambigu du passé colonial.

Du vétéran van Manen au « vinho verde » de Mercedes Dassy. Une ouverture généreuse.

b4 summer  - Mercedes Dassy

b4 summer – Mercedes Dassy – © Caroline Mathieu

A la soirée d’ouverture le week-end dernier, la Companhia Nacional de Bailado de Lisbonne proposait la danse néo-classique du vétéran hollandais Hans van Manen. Une soirée composée de trois œuvres courtes d’une vingtaine de minutes. Une danse presque abstraite, en référence colorée à Mondrian mais qui dessinait une belle grammaire du corps allongé, étiré, très sensuel avec un jeu de bras délicat. Un classicisme indémodable, abstrait et concret qui a ravi et séduit grand public et amateurs plus pointus.

Avec Mercedes Dassy, la parole est donnée à une jeune interprète qui a fait ses classes avec Liesbeth Gruwez (AH/HA) et poursuit de belles collaborations avec, entre autres, Leslie Mannès (Forces). Elle s’est lancée depuis deux ans dans des aventures personnelles centrées sur un féminisme moderne. Au remarqué i-Clit, à l’humour décapant, pied de nez subtil au machisme ordinaire (nominé aux Prix de la Critique 2018), succède un deuxième volet. b4 summer qui se veut une réflexion sur l’engagement féministe à la structure fragile. Commencée dans l’immobilité d’un divan, poursuivie au sol par un cri primal déchirant, la performance se poursuit par un chant à la douleur contenue. J’avoue être resté un peu en marge de ce spectacle étrange, dominé par une logique qui laisse trop peu de place à la danse. Mais le public jeune a « marché ». Un spectacle performatif qui pose de bonnes questions sans me convaincre esthétiquement. Le troisième volet promis fera peut-être la synthèse de l’engagement et de l’art chorégraphique, comme le premier, i-Clit ?

b4 summer, présenté au Théâtre de Liège, fait étape en ce moment à la Balsamine à Bruxelles (jusqu’au 8 février) avant de filer sur Mars Mons (4 avril)

Le programme « Pays de Danse » jusqu’au 21 février.

– © JM Chabot

Il reste évidemment beaucoup à voir au festival. Sur le thème portugais, il ne faut pas rater Marco da Silva, dont Brother interroge les racines africaines et la chaleur tribale d’un groupe multi-ethnique. Hip, a pussy point of view où la vedette queer s’expose dans un solo au « corps » politique et sexuel assumé. Dans Dream is the dreamer, Catarina Miranda nous charmera dans un solo saupoudré, annoncé fluo et lumineux, inspiré du théâtre No japonais avec le danseur vedette André Cabral.

Autres ouvertures internationales : la jeune Française Marion Sifert dissèquera les zones sombres de l’enfance dans Le Grand Sommeil. La chorégraphe sud-coréenne Eun-Me Ahn, déjà présente en 2014 revient avec North Korea Dance, un regard ironique sur l’art viril, militaire et folkorique de la Corée du Nord.

Ce week-end (7/8) permettra de voir les spectacles de deux Bruxellois d’adoption dont Weg d’Ayelen Parolin, créé à la Biennale de Charleroi Danse à l’automne 2019. Un kaléidoscope polyphonique parsemé de touches grotesques. L’Argentine de Bruxelles a déjà été lauréate des Prix de la Critique en 2017 pour ses Nativos créés ici à Liège avec des interprètes coréens. Prix de la Critique aussi (2018), Burning un spectacle circassien dépouillé et très chorégraphique, de Julien Fournier et Laurence Vielle.

En somme, les amateurs de danse contemporaine mettront le cap sur Liège et sa province pendant deux bonnes semaines encore.

Pour consulter le programme complet de Pays de danse au Théâtre de Liège (et de nombreux centres culturels) jusqu’au 21 février.

Cet article est également disponible sur www.rtbf.be

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