• Danse  • « Michèle Noiret à contrechamp » : un documentaire passionnant, en forme d’autoportrait.

« Michèle Noiret à contrechamp » : un documentaire passionnant, en forme d’autoportrait.

Ce jeudi soir dans « Tout le Baz’Art » à 22h20 sur la Trois , le documentaire de Tanguy Cortier consacré à Michèle Noiret.

Les rapports de Michèle Noiret avec le cinéma sont intenses. Depuis plus de 15 ans pas une chorégraphie d’elle qui ne joue avec l’image. Le documentaire de Tanguy Cortier Michèle Noiret à contrechamp explore aussi ses autres sources d’inspiration, un père poète, Joseph Noiret et un maître musicien, Karlheinz Stockhausen.
 

Le réalisateur, Tanguy Cortier l’avouait avec simplicité lors de la projection publique au Théâtre National: il ne connaissait rien à la danse et rien de Michèle Noiret avant d’entreprendre son documentaire. A l’inverse Michèle Noiret est depuis plusieurs années fascinée par l’instrument cinéma qui structure toutes ses nouvelles créations, à la fois élément de découverte, d’introspection intime et de narration. La caméra est aussi le miroir d’un corps en mouvement et le boulier compteur du temps qui passe sur ce corps. A Tanguy Cortier, donc, la réalisation du documentaire mais à chaque étape on sent la « griffe  » exigeante de Michèle Noiret, fabriquant une sorte d’autoportrait à la Rembrandt, interrogeant avec rigueur et lucidité son corps et son visage et leur potentiel créatif. Avec, comme fils conducteurs, l’amour d’une fille pour son père poète, Joseph Noiret, membre important du groupe Cobra et la reconnaissance pour son « maître », découvert à 16 ans, Karlheinz Stockhausen.

C’est une longue histoire que cette fascination continuée pour Stockhausen, une sorte de « valse à 5 temps ». Une rencontre, précoce, en 1977, à Mudra, école de danse de Béjart. Outre le goût d’une musique exigeante, il lui offre un système de notation très particulier du mouvement, à la base de toutes les créations de Michèle Noiret. Une première création, de danse pure, Solo Stockhausen (1997) ou « comment créer une danse qui, portée par l’œuvre musicale, y trouve sa place, sa respiration propre, sa vie intrinsèque ». En 2004, Solo un film de Thierry Knauff confie à l’image le soin de recréer, comme un poème visuel, l’univers chorégraphique et musical de Noiret/Stockhausen. 10 ans plus tard (2014) Palimpseste, retour à la danse pure ? Oui mais enrichie des deux versions antérieures et donc réécrit sur le parchemin de cette double mémoire ! Enfin, étape 5, Michèle Noiret à contrechamp, documentaire de Tanguy Cortier, guidé par Michèle Noiret, utilise la chorégraphie Palimpseste, réécriture des 2 précédents « solos » ! Une obsession mais aussi une construction perpétuelle. Stockhausen imprègne Michèle Noiret comme Steve Reich Anne Teresa De Keersmaeker. Palimpseste rythme ce film/éclairage de Cortier sur l’artiste et ses racines, une bio spirituelle.

Les archives de la RTBF (coproductrice) permettent de découvrir Stockhausen, bien sûr, ou la danseuse Lise Vachon, une de ses interprètes favorites. Et Michèle Noiret, à diverses étapes de sa vie, avec un commentaire actuel sur son évolution : un portrait où on sent l’exigence, la lucidité sur elle-même et aussi l’amour pour ce père, Joseph, membre du groupe Cobra, chéri infiniment. Là, on sort de l’esthétique pour se pencher sur une enfance heureuse qui l’a construite. Les vagues de la mer du Nord deviennent des bocaux à souvenirs, le flux et le reflux d’une mémoire vive et nostalgique.

On sort de ce documentaire ému par la tendresse d’une fille et la fidélité à son maître de musique. Mais aussi séduit par la perfection de ce corps, inspiré par la musique. Et par la franchise de la chorégraphe, mesurant l’évolution du temps sur son corps et le défi permanent d’en faire un outil au service de ses intuitions. A la fin de la projection, question à ma voisine, une jeune femme de 18 ans. « –Vous connaissiez Michèle Noiret ?-Non. -Et votre impression ? « Elle dégage ».-Ca veut dire ?-Sa personne dégage une force et une sensualité qui m’ont impressionnée ». Le mot de la fin ? A vous de voir ce dimanche ou jeudi soir. A voir aussi une exposition sur Joseph Noiret à partir du 17 à Ittre.

– » Michèle Noiret à contrechamp « , le documentaire de Tanguy Cortier passe dimanche 11 octobre à 17h dans Tout le Baz’Art sur Arte Belgique puis sur La Trois le jeudi 16 à 22H30.

-Exposition  » Joseph Noiret et l’écriture, Cobra, Phantomas et après… » au Musée Marthe Donas, 36 rue de la Montagne, 1460, Ittre, du 17/10 au 29/11.

 

Christian Jade (RTBF.be)

Cet article est également disponible sur www.rtbf.be

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