« Les Falaises » aux Tanneurs. « Atmosphère, atmosphères, de jolies gueules d’atmosphère.. »
On se souvient de la tirade historique et irrésistible d’Arletty dans « Hôtel du Nord » de Marcel Carné. « Atmosphère, atmosphère, est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ?« . A la fin de cette petite heure et quart de théâtre pseudo policier, intitulée « Falaises », mon impression (positive) est qu’à défaut d’intrigue, volontairement inexistante, les jeunes acteurs avaient laissé en nous une belle trace visuelle . Ce qui pour un spectacle de fin d’études amélioré, à l’Insas, est pas mal.
Le spectacle s’ouvre sur un paysage sans acteurs dont le décor hyperréaliste, très « habité », à défaut d’habitants, rappelle irrésistiblement les couloirs de l’Insas. Hyperréalisme rendu fascinant par les très belles lumières d’Alice De Cat et une bande son amusante. Quand surgissent ici et là des « personnages » à la fois pressés et égarés, on s’aperçoit que le décor en question est celui d’un commissariat où errent des flics relax, en recherche non de meurtriers mais d’eux-mêmes. Oh, ce ne sont pas des matamores, mais des « pov’ mecs » dont une femme, puis deux, perdus au milieu de nulle part dans un commissariat de quartier au bord des falaises de l’Océan. Au bout d’un moment, ils semblent avoir déniché quelque chose comme leur « affaire du siècle » à eux qui instaure un branle-bas de combat vers une destinée commune. Mais c’est loupé, leur truc, et ils reviennent ruminer leur échec dans leur petit monde banal en cultivant leurs petits désirs dans le groupe et leurs petites ambitions de monter dans leur maigre hiérarchie. Métaphore, vous avez dit métaphore ? Mais de quoi ? Le spectacle est souvent drôle surtout au début puis l’humour s’effiloche comme l’intrigue. On dirait un tableau vivant, très beau (scénographie et lumières) dont les acteurs, faux policiers, ne seraient que des objets parmi d’autres.
Au total, un « bazar » théâtral minimaliste, curieusement creux, et qui résonne quand même de l’intérieur. L’interprétation est inégale mais l’élan est bien là. Le collectif intitulé Fanny Ducat est mené par Antonin Jenny, en résidence aux Tanneurs et qui prépare une tétralogie, comme Wagner. L’ombre de Maître Armel Roussel plane par là, et la majorité du groupe est faite de Français, contaminés par un surréalisme à la Belge. Bienvenue au club.
« Les Falaises » Fanny Ducat/Antonin Jenny.
Aux Tanneurs jusqu’au 1er Février.
Cet article est également disponible sur www.rtbf.be