Avignon 2016. Les Doms. Patrick Corillon. Les vies en soi.
Parmi les quatre spectacles présentés à Avignon un seul a été vu cet automne à Bruxelles.
En voici la critique.
Patrick Corillon, le multiple : plasticien, écrivain, dramaturge. ***
Patrick Corillon, un Français installé à Liège, est directeur, avec Dominique Roodthooft, d’une petite structure de création, le Corridor. Là, on n’est plus dans la recherche mais dans une œuvre accomplie, qui se propage un peu partout dans le monde. Son œuvre plastique a connu les honneurs de la Documenta de Kassel, du Centre Pompidou, de la Tate Gallery et de… Bozar. Mais ses performances « contées », une spécialité « inouïe », un ovni culturel inépuisable sont à voir au moins une fois dans une vie de » curieux culturel « . Il a déjà conçu un beau cycle sur » Le Diable abandonné » et recommence ici un quatuor, bientôt quintette d’ailleurs sur le thème » Les vies en soi « . Il risque de décevoir tous ceux qui restent dans un genre, soit le conte, soit la création plastique, soit la » performance » classique…où on évite de trop parler !. Il enchantera ceux qui aiment le mélange des genres et recherchent une « performance » un peu folle, mêlant le plus vieux de tous les arts, la parole, le conte et l’autre très vieil art…plastique. Pas de retour toutefois à l’art des cavernes ou à Homère, encore que… il aime se balader comme Ulysse dans le grand monde… actuel et son monde intérieur. Corillon se raconte et nous raconte en jonglant avec les mythes, les sensations, les non-sens à la française mais aussi avec de grands livres d’images étalés contenant des mots qu’il extirpe du livre et brandit comiquement! Mardi, c’était l’histoire de » La Rivière bien nommée « . On part du Pont Mirabeau pour couler dans une forêt de symboles et de petites phrases extirpées de grands livres superbement illustrés. Ce soir » L’appartement à trou« . Extrait pour en mesurer l’humour et l’écriture malicieuse :
» Tu dois faire comme les chats. Un chat ça écoute ce qu’on lui dit, ça ne juge pas, ça ronronne et ça mène sa vie intérieure…C’est un peu comme si tu plaçais tes mots à la banque. A la différence près qu’une fois déposés tu ne pourras plus les reprendre ; ils fructifieront dans la vie du chat à un taux que tu ne connais pas… Corillon, c’est pareil : une espèce de chat qui nous dépose des mots dans notre banque intérieure : à nous de les faire fructifier !
– Au Théatre des Doms à Avignon du 11 au 23 juillet.
Christian Jade (RTBF.be)
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