• Théâtre  • Reprise à Océan Nord. « Final Cut » de et par Myriam Saduis. Un solo (accompagné) au bord du gouffre. Un grand moment de théâtre. ****

Reprise à Océan Nord. « Final Cut » de et par Myriam Saduis. Un solo (accompagné) au bord du gouffre. Un grand moment de théâtre. ****

Le « Final Cut » de Myriam Saduis, créé au Théâtre Océan Nord à l’automne 2018 est repris pour 2 semaines dans son lieu d’origine jusqu’au 23 janvier. Après avoir beaucoup bourlingué, du Festival de Tunis au Festival d’Avignon 2019 où il a fait l’unanimité (du public et de la critique). « Le Monde » l’a placé dans les 20 meilleurs spectacles du Festival d’Avignon 2019 (IN et OFF réunis). « Sceneweb » (le principal site critique français sur le net) l’a placée au 5è rang des 10 meilleurs spectacles de la décennie à Avignon, ex-aequo avec Frank Castorf. Enfin les Prix Maeterlinck de la Critique lui ont attribué deux statuettes : meilleur spectacle et meilleure actrice.

Voici quelques extraits de ma critique 2019

« Comment se construire avec un père musulman nié par une mère catholique, dans un contexte colonial ? » s’interroge Myriam Saduis dans « Final Cut ».

Elle nous confie son équation compliquée, nourrie de psychanalyse, entre un père musulman tunisien et une mère catholique italo-française. Mais c’est toute une époque, une tranche d’histoire (la fin des années 50, le début des années 60) qu’elle fait revivre avec finesse, sensibilité et rigueur. Elle a vécu de l’intérieur ce contexte raciste qui refait surface aujourd’hui dans notre monde de manière inquiétante. Et les yeux dans les yeux, avec une passion froide et déterminée, non dénuée d’un humour parfois caustique, elle nous met en garde contre ce retour du racisme : elle sait de quoi elle parle.

Au centre une mère italo-française, un vrai personnage de roman.

Une douleur existentielle maîtrisée par l’intelligence et la présence scénique

Myriam Saduis et Pierre Verplancken dans – © Marie-Françoise Plissart

Myriam Saduis raconte simplement, cliniquement, avec une émotion contenue et pas mal d’humour le chemin d’une adolescente puis d’une adulte qui cherche sa vérité dans le brouillamini d’une famille traumatisée par la fin de la colonisation française en Afrique du Nord.

La structure est simple, un récit d’allure chronologique mais élargi à de nombreux flash-back qui peuvent prendre une forme verbale, visuelle (petits films d’actualité historique, photos de famille) ou musicale (une série de tubes d’époque de Barbara aux « Parapluies de Cherbourg »). Avec un très beau « final cut », un zoom avant dont je vous laisse la surprise.

Surprise aussi : on avait oublié que Myriam Saduis était actrice, sortie de l’Insas, alors que depuis 10 ans c’est la metteuse en scène qui nous a séduit. Elle occupe l’espace avec une autorité tranquille.

Au total une confession lucide, sans exhibitionnisme, sur une douleur lentement maîtrisée, une réflexion toujours actuelle sur le racisme ordinaire et un art, impressionnant, du récit et de la présence scénique. Chapeau !

 « Final cut » de et par Myriam Saduis. Du 12 au 23 janvier (dimanche inclus) au Théâtre Océan Noir

Cet article est également disponible sur www.rtbf.be

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